ISRAËL, LA BRIDE SUR LE COU (1/2)

Publié le par bouhmouch

 

Rédigé en août 2010

 

1. Fourberie et contrevérités

  

 «Si l'on ment, il faut mentir jusqu'au bout.
Il faut du mensonge faire un acte de foi»  
 D. Lévy-Chedeville

Le drame palestinien a débuté en 1917, lors de la fondation du «foyer national juif», avec la complicité du gouvernement britannique et de la Société des Nations. La déclaration Balfour visait probablement en sous-main à éloigner les juifs d’Europe. Les dignitaires antisionistes, qui s’y étaient opposés à l’époque, l’avaient qualifiée d’antisémite. L’idée était que l’émigration des juifs de la diaspora allait se faire sous la contrainte et susciterait des soupçons sur leur fidélité à leurs pays respectifs...

  

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Toujours est-il que depuis cette date, l'entité sioniste a occasionné les destructions et souffrances les plus alarmantes. Des individus fanatisés venus de Pologne, de Kiev, de Biélorussie, de Grande Bretagne, etc. se déclarent maîtres des lieux, font main basse sur les terres, planifient les expulsions, la mort et la dévastation.

   

A l’instar des Afrikaners, leur hégémonie ne pouvait se fonder que sur un système politique sordide et avant tout sur une oppression militaire implacable. Zéev Jabotinsky, un dirigeant sioniste (né en Ukraine), l’a exprimé ainsi : «Le sionisme est une aventure de colonisation et c’est pour cela qu’elle est dépendante d’une force armée» (son livre «Le mur de fer», 1923). Raphael Eitan, un chef militaire (de parents russes), est plus explicite : «La force est l’unique chose qu’ils [les Arabes] comprennent. Nous devons utiliser la force absolue jusqu’à ce que les palestiniens viennent ramper devant nous» (Journal Yediot Aharonot du 13/04/83)... L’Ouganda revient de loin : ce pays a failli en 1903 faire les frais d’un projet d'implantation juive (sur proposition britannique).

A mon sens, l’hégémonie impudente d’Israël est due à deux facteurs clés : une propension phénoménale à falsifier la vérité, appuyée sur un vaste réseau de propagande et de désinformation (partie 1) ; le soutien coupable et avilissant des Etats et médias occidentaux (partie 2). Le présent article se limite au premier.

  

  

«Nous avons pris leur pays»

 

Le peuple palestinien a affaire à un adversaire «sûr de lui et dominateur» (C. De Gaulle, 1967), un adversaire fourbe et d’une cruauté inégalée. Les leaders israéliens successifs savent s’y prendre pour dire le contraire de ce qu’ils font (ou ce qu’ils comptent faire). Ils inventent sans relâche les échappatoires et les esquives, créent les faits accomplis sur le terrain. Lorsqu'ils s'engagent le matin, c'est pour se rétracter le soir. On déclare devant les caméras que tel point de passage sera ouvert et l’on s’aperçoit qu’il est (presque) toujours fermé. On annonce que les pourparlers avec les Palestiniens doivent s’engager sans condition préalable ; deux jours après, on crée la surprise en posant une condition sine qua non : reconnaître «Israël en tant qu’Etat juif». On promet à chaque fois de stopper la colonisation, cependant que les constructions se poursuivent furtivement (plus de 100 colonies ont été créées depuis les accords d’Oslo).

Les «accords» signés sont systématiquement foulés aux pieds. Le phénomène a pris une ampleur invraisemblable. La boutade de Ben Gourion, à cet égard, est très éloquente : «Si j'étais un leader arabe, je ne signerais jamais un accord avec Israël. C'est normal, nous avons pris leur pays» (cité par Nahum Goldmann dans «Le paradoxe juif», 1976). La bravade est prononcée haut et fort, sur un ton plein de morgue et de dérision.

  

3183487278_def986878b.jpgLe rêve de Sharon était de refouler (vers n'importe où) plus de 60 % des Palestiniens de Cisjordanie pour y implanter un million de Juifs (de n'importe où). Des milliers d’habitations palestiniennes sont démolies régulièrement sous des prétextes extravagants. Il arrive souvent que des colons s’emparent des maisons évacuées sous la protection active et prévenante de l’armée. Assister en spectateur à la destruction ou la confiscation de son foyer, se retrouver dans la rue avec ses enfants et quelques ustensiles sauvés à la hâte : nul ne peut imaginer ce que les victimes ressentent. Jamais dans l’histoire, une force d’occupation n’a été aussi haineuse, aussi inhumaine.

  

 

 Expatrier une population (des autochtones), transplanter une autre (des colons)… rien ne semble mettre fin à la tragédie. L’ordre d'expulsion relève d'un programme mûrement réfléchi : déposséder et chasser le plus grand nombre possible de Palestiniens. «Nous devons tout faire, disait Ben Gourion, pour nous assurer qu’ils ne reviennent pasLes vieux mourront et les jeunes oublieront» (18/07/48, voir www.france-palestine.org)...

 

Le monde, à force de prêter le flanc à la manipulation, finit par oublier que l'occupation est la cause de toutes les atrocités. Les Palestiniens sont des sinistrés. Affaiblis par 60 ans de détresse, trahis par les uns et les autres, ils sont devenus vulnérables. Ils ont perdu la terre, celle de leurs ancêtres, font face à la fois à une puissance mondiale et à une puissance régionale ; ils ne bénéficient pas du soutien des médias internationaux, ne peuvent pas compter sur les Etats voisins... Embarqués dans des pourparlers chimériques, ils regardent passer les décennies perdues. Le train-train est bien connu : la partie israélienne fait mine de négocier et le médiateur américain est à la fois juge et partie. Les choses étaient pourtant claires, comme le clamait Z. Jabotinsky : «Une réconciliation volontaire avec les Arabes est hors de question, que ce soit maintenant ou dans le futur» (son livre «Le mur de fer», 1923). On comprend pourquoi le «processus de paix» – dont la simple évocation semble aujourd'hui suffire en elle-même – a l’air d’un canular reproductible à l’infini. Les mots sont en train de prévaloir sur les faits.

 

 

Bluffs et leurres à la pelle

 

Les extrémistes sionistes – comme jadis les Blancs d’Afrique du Sud – savent légitimer leurs tueries, diaboliser leurs victimes. Ils recourent toujours aux mêmes rengaines : celles de «la menace de destruction d'Israël», des «juifs jetés à la mer», de la «montée de l'antisémitisme en Europe», des «liens terroristes internationaux», du droit à la «légitime défense» ...Les artifices sur mesure, dont sont truffés les manuels d’histoire, font le lit de l’extrémisme israélien, décuplent la violence et la haine à l’égard du Palestinien. Farder la vérité est une armature essentielle du projet sioniste.  Un certain général Matityaha Pelet l’admettait, explicitement et en connaissance de cause : «La thèse du danger d’un génocide qui nous menaçait en juin 67 et qu’Israël se battait pour son existence physique était seulement du bluff…» (Journal Ha’aretz du 19/03/72). Un bluff qui a partout très bien pris.

 

Vous voulez savoir comment raisonnent les leaders sionistes ? La déclaration de Netanhyahu, à cet égard, est assez caractéristique : «Israël aurait dû exploiter la répression des manifestations en Chine lorsque l’attention du monde s’est focalisée sur ce pays, pour mettre à exécution des expulsions massives parmi les Arabes des territoires» (Journal Hotam du 24/11/89). Comment peut-on se fier aux simagrées étalées sur la scène ? Les forfaits du sionisme, c’est ce qui se passe derrière les décors, hors de la vue du spectateur.

 

Des civils sont-ils tués sur la plage de Gaza par un obus israélien ? On produira «l’information» selon laquelle une mine posée par le Hamas est à l’origine de l’hécatombe… et les médias (à la botte des lobbies ou par réflexe conditionné) marchent tête baissée. Le nec plus ultra de la perfidie, c’est lorsque les alliés inconditionnels sont assaillis pour leur «manque» de dévouement à la cause du sionisme. Témoin le site «La voix de la communauté juive en France» qui s’en prend aux  médias français, accusés de «partialité et de dénigrement systématique d’Israël» !... Déroutant, n’est-ce pas ? Il suffit de voir le parti pris véreux de France 2, RFI, Arte et France 24 en faveur des menées israéliennes pour mesurer l’ampleur de l’intoxication sioniste. Et voilà que le 2 août dernier S. Peres accuse l’establishment britannique d’être «profondément hostile à Israël» et de «prendre parti pour les Arabes» ! Il ne faut pas avoir peur de trop forcer sur les leurres (et les jérémiades)…

 

Dirigé par une extrême-droite machiavélique, l’Etat colonial prône ouvertement l’épuration ethnique. C’est un Etat au-dessus des lois, dont l’armée est prédisposée à piller, affamer et massacrer des civils. C’est par ailleurs un espace où règne une atmosphère d’animosité et de violence impitoyables – du fait non pas de «l’ennemi» en face, mais bien de la manière dont les israéliens se comportent les uns avec les autres. Les ashkénazes manifestent un mépris hautain à l’égard des sépharades et des arrivants d’Europe de l’Est ; les ultra-orthodoxes et les laïcs ne cessent de s’entre-déchirer ; les falashas noirs, mal aimés et mal lotis, doivent batailler pour survivre... Un tissu social hétéroclite et profondément déséquilibré, c’est le poison quotidien de l’entité sioniste.

  

4668239921_e969872d83.jpgQu’importe, la machine de propagande a réussi à faire passer les agresseurs pour des êtres évolués, «acquis aux valeurs de l’Occident», assaillis de toutes parts par des brutes incultes, sans foi ni loi. Cela ne vous rappelle-t-il pas les films westerns des années 50 et 60, où les indiens personnifiaient toujours les barbares, les «méchants» ?... Le vocabulaire utilisé participe à la mystification : le terme «conflit» permet de faire l’impasse sur l’acte de spoliation, en laissant sous-entendre qu’une lutte armée a lieu entre deux Etats aux motivations contradictoires. L’opinion internationale a vite gobé la distinction entre les colonies «légales» et les colonies «irrégulières» ou «sauvages». S’agissant d’expulsions, de démolition de logements, de piraterie en haute mer, d’assassinats de civils, on dira par exemple «la Knesset a voté…», «la haute cour a ratifié…», «conformément à telle loi», etc. Les crimes sont accoutrés d’une parure de légalité et, là encore, les médias (y compris arabes) suivent tête baissée.

 

 

 

Les bêtes marchant sur deux pattes

 

Dans «le seul pays démocratique du Moyen-Orient», les quelques étudiants palestiniens en médecine sont poussés à collaborer avec le chabak (service de renseignement) pour avoir droit aux stages dans les hôpitaux de Jérusalem. Près de 8500 Palestiniens croupissent en silence dans des camps de détention. Parmi eux, 340 enfants vivent dans une terreur constante. Agés de 11 à 14 ans, ils sont victimes de harcèlements pervers et souffrent de négligence médicale. Pendant que les tortures les plus effroyables sont infligées à ces prisonniers, l’unique soldat israélien détenu par le «mouvement terroriste» à Gaza se prélassait tout récemment en regardant les matchs de la coupe du monde de football. Toutes les voix s’élèvent pour réclamer nommément la libération de ce soldat ; personne ne fait allusion au sort de ces milliers de détenus en détresse. L’évidence surgit : tous les hommes sont égaux, mais certains moins que d’autres.

Pendant l’attaque sanglante de Gaza, les journalistes ont été tenus à l’écart «pour des raisons de sécurité». Mais apparemment cela ne valait pas la peine qu’on émette une protestation. Le terrorisme d'Etat est invariablement disculpé et ne soulève aucune condamnation crédible.

 

C’est à une poignée de résistants, habilement diabolisés, qu'on demande cyniquement d'arrêter «la violence». Se défendre contre la colonisation, résister à la tyrannie est légitime autant qu'honorable. Cela tombe sous le sens... Mais le vocable «terrorisme», utilisé tous azimuts, a brouillé les cartes. Ce mot magique, qui conforte la pratique de mystification israélienne, est maintenant entériné par tous les médias. Tant qu’à faire, le patriote français Jean Moulin ne serait qu’un fieffé «terroriste», lui le héros national dont les cendres ont été transférées au Panthéon ; on devait aussi désavouer Nelson Mandela pour son opposition au régime d'apartheid, le groupe arménien Manouchian pour sa lutte contre les nazis.

Il suffit d’arborer la bannière de la «lutte contre le terrorisme» et tous les coups sont permis : destruction de logements et de terres agricoles, arrachage de milliers d’oliviers, détérioration de réservoirs d'eau et stations de pompage, bombardement des écoles, mitraillage des ambulances, assassinats ciblés des dirigeants palestiniens (s’ils ne collaborent pas)... Jamais dans l’histoire, une force d’occupation n’a été aussi destructrice, aussi meurtrière.(1)

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Un certain Friedman écrivait naguère dans le New York Times, “vous [les Palestiniens] ne pouvez pas construire une nation sur les épaules d'assaillants suicidaires”. Des journalistes, ici et là, savent manier les contrevérités. Surtout n’allez pas leur dire qu’Israël a fondé son existence sur l’activisme criminel de plusieurs organisations terroristes (Haganah, Irgoun, Gang Sterne, mouvement clandestin Lehi) et une série de massacres impitoyables (Sabra et Chatilla, Jenine, Ramallah, etc.). N’essayez pas de leur faire remarquer que les principaux responsables sont devenus plus tard des hommes d’Etat (Shamir, Begin, Rabin, Peres, entre autres).

 

Le jeu est maintenant bien rôdé : un journal israélien balance un mensonge, puis se rit de voir comment celui-ci est traité par les médias internationaux. Un dirigeant invente n’importe quel subterfuge et voilà que la partie concernée de perdre de l’énergie à se disculper. Un exemple : Haaretz, en juin dernier, a publié une «information» alléguant l’opposition de Mahmoud Abbas à la levée du blocus maritime imposé à la bande de Gaza. Plusieurs dirigeants palestiniens se sont alors échinés à porter un démenti catégorique (Abou Roudeina et Saeb Orekat notamment). Autre exemple : l’allégation selon laquelle le bateau humanitaire libanais Marie serait téléguidé par le Hezbollah. Là encore, on perdra du temps à «réagir» à l’accusation... Autant la duperie est sournoise, autant la réaction semble ingénue.

 

L’annonce récente des «mesures d'allégement du blocus» de Gaza (qui continue, notons-le, d’être bombardée) a eu le don d’alimenter la rhétorique médiatique et de dévier l’attention. Cette combine visait à rehausser l'image de l’occupant suite à l'agression contre la flottille humanitaire turque. Tel porte-parole sioniste déclare avec cynisme que «150 camions remplis de nourriture» entrent par jour dans la bande de Gaza… ceux qui l’écoutent ne sont pas censés savoir qu’il y a douze ans ce nombre était de 1800 camions par jour et qu’entre-temps la population de ce territoire a augmenté.

 

Menahem Begin vous connaissez ? C’est celui qui a dit que les Palestiniens sont des «bêtes marchant sur deux pattes» (cité par Amnon Kapeliouk, «Begin and the beast», 1982) ! Le sionisme s’acharne sur eux depuis 60 ans, les voue à la servitude et l’anéantissement. On leur en veut d’abord d’être les maîtres du sol. On leur en veut aussi parce qu’ils ont du sang dans les veines (à revendre). Par leur présence sur la scène, ils rappellent en permanence la nature délictueuse de l’occupation. Ils figurent pour ainsi dire la «mauvaise conscience» du spoliateur. Du coup, on les expulse, on les emprisonne, on les torture, on les diabolise, on les affame, on les bombarde, on les assassine… Décidément, l’Ouganda l’a échappé belle.

 

A chaque fois, on se dit que la mesure est comble, que le summum de l’abomination est atteint, à chaque fois le bouchon est poussé plus loin. Encore et encore... La destruction de maisons palestiniennes à grande échelle vous a-t-elle horrifié ? Eh bien, on décide de démolir des villages entiers (45 en juin dernier, dans le Naqab, abritant environ 85.000 Palestiniens). Un israélien lance sa voiture sur un enfant palestinien et l’écrase sur le trottoir… il dit ensuite qu’il ne l’a pas fait exprès, et l’affaire est close. Des cimetières musulmans sont régulièrement saccagés ; d’autres sont ratissés et transformés en parcs de jeux, jardins et parkings (comme à Ramallah, Jaffa et près de Tel-Aviv). Le cimetière historique de Jérusalem a été plusieurs fois profané avant de subir l’épreuve des pelleteuses mécaniques. Il renfermait les tombeaux des Saints de l’Islam et des martyrs de Salaheddine…

 

Se tromperait celui qui croirait que l’infamie a une limite. C’est que, tout simplement, il n’y a pas de limites, pas de garde-fou, pas de ligne rouge. Des extrémistes auxquels vous faites comprendre que, quels que soient les excès commis, ils seront toujours soutenus et confortés, n’ont aucune raison de s’arrêter. Ils ont la bride sur le cou…

 

T.BOUHMOUCH, Casablanca, août 2010.

 

Article publié le 1/09/2010 sur les sites :

  http://www.legrandsoir.info/Israel-la-bride-sur-le-cou.html  

 http://www.palestine-solidarite.org/analyses.Thami_Bouhmouch.010910.htm              http://www.lepost.fr/article/2010/09/16/2223536_israel-la-bride-sur-le-cou.html  

 



(1)   Qu’en on juge par les déclarations de ces leaders sionistes : «Nous devons utiliser la terreur, les assassinats, l’intimidation, la confiscation des terres et l’arrêt de tous les programmes sociaux afin de débarrasser la Galilée de sa population arabe» (Israël Koenig, in «The Koenig mémorandum», 1976 - www.historyofisrael.info) ; «Les palestiniens seront écrasés comme des sauterelles et leurs têtes éclatés contre les rochers et les murs » (Yitzhak Shamir, 19/06/88 – www.anti-imperialisme.com) ; «Tuer n’est pas un crime si les victimes ne sont pas juives» (le rabbin Yitzhak Ginsburg, Journal Jérusalem post, 19/06/89).

 

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